“Pourquoi le décollage et l’atterrissage d’un avion sont si dangereux ?”, Habib Aboukhedoud
Il est beaucoup plus probable que vous mourriez en mangeant un bon Fufu, ou un bon Atiékè voir même un Ndolê que dans un crash aérien. Ceci dit, les accidents arrivent quand même. À un ratio d’environ un crash d’avion mortel pour 2,5 millions de vols.
Vous avez bien lu: 1/2,5000,000 de vols. Et la moitié de ces accidents ont lieu pendant une phase très courte du voyage. Vous voulez savoir quand vous devriez le plus stresser pendant votre prochain vol ? Gardez votre ceinture de sécurité attachée et préparez-vous à des turbulences.
Le décollage et l’atterrissage sont largement considérés comme les moments les plus dangereux d’un vol. Mais ce n’est que partiellement vrai. Regardons un peu ce tableau. Boeing tient un registre des crashs mortels sur des vols commerciaux chaque année et les classe en fonction du moment où ils se sont produits pendant le vol.
Boeing décompose le vol, d’une durée moyenne d’1h30, en huit phases. Mais nous n’allons examiner que ces cinq phases.
En commençant par le début
Le décollage et la montée initiale. Cette phase ne compte que pour 2 % sur la durée totale du vol, mais elle représente 14 % des accidents mortels. Ce qui peut sembler peu, jusqu’à ce que l’on compare avec la phase de croisière. Un avion passe plus de la moitié de son temps de trajet d’1h30 en croisière, mais seulement 11 % des accidents mortels se produisent pendant cette phase.
Il reste donc la descente finale et l’atterrissage. Ces phases occupent environ 4 % du temps de vol moyen et durent deux fois plus longtemps que le décollage et la montée initiale. Mais 49 % des accidents mortels se produisent dans cette courte fenêtre, ce qui fait de la descente finale et de l’atterrissage les moments les plus mortels d’un vol classique.
Alors, que se passe-t-il pendant cette phase ? Généralement au décollage et à l’atterrissage, l’avion vole bas, et lentement. Et quand des problèmes surviennent, les pilotes ont très peu de temps pour réagir. Lorsque l’avion vole en croisière à 38.000 pieds d’altitude (11,582.4m), le pilote a le luxe d’avoir le temps et la place de corriger sa trajectoire. Même si les deux moteurs s’éteignent, l’avion ne tombera pas du ciel. Il planera.
En croisière, un avion de ligne typique perd environ 1 kilomètre d’altitude pour chaque dizaine de mètres avancés, ce qui donne au pilote un peu plus de 8 minutes pour trouver un endroit où atterrir. Mais si quelque chose se passe mal près du sol, cette fenêtre se rétrécit considérablement.
Pour un avion de ligne classique, le décollage ne dure que 30 à 35 secondes. Si un moteur tombe en panne ou si le train d’atterrissage se bloque, le pilote n’a presque pas le temps de décider s’il doit quand même faire décoller l’avion ou s’il doit essayer de maintenir une bête métallique de 90 tonnes au sol.
Les décollages interrompus sont rares.
Rappelons que quand vous roulez sur une piste de décollage à plus de 270 kilomètres par heure, les choses se passent très vite. La décision d’interrompre un décollage ( rejected Take Off, RTO) est une décision très intense parce qu’il faut le faire en dessous d’une certaine vitesse, sinon, à cause des lois physiques, l’avion ne pourra pas s’arrêter.
Si à un moment donné l’avion n’a pas décollé ou ne s’est pas arrêté, il va sortir de la piste et s’écraser. Ce qui, selon l’aéroport, peut vouloir dire que l’avion va finir dans un champ ou littéralement tomber d’une falaise, comme à l’aéroport régional de Telluride dans le Colorado, aux Etats-Unis.
La piste y est terrifiante car elle se trouve coincée entre deux pentes de plus de 300 mètres de dénivelé (voir photo ci-dessous). Pour les pistes dangereuses comme celle de Telluride, les aéroports installent un dispositif d’arrêt d’urgence appelé ‘Engineered Materials Arrestor System’ (EMAS).
Un EMAS est un lit d’arrêt placé à l’extrémité d’une piste, conçu pour s’effondrer sous le poids d’un avion, agrippant ses pneus et, idéalement, arrêtant l’avion dans sa course avant qu’il ne chute de 300 mètres. Le dispositif fonctionne de la même manière pour un atterrissage qui aurait mal tourné.
Alors, qu’est-ce qui rend l’atterrissage bien plus dangereux que le décollage ? Pour faire simple, il est plus facile de faire voler un avion que de le faire s’arrêter. Pour faire simple : On ralentit, et on fait s’approcher l’avion du sol. Et comme la vitesse de l’avion est déjà ralentie, n’importe quel coup de vent ou quoi que ce soit de ce type pourrait avoir un impact plus dramatique qu’au décollage, voilà pourquoi l’avion oscille latéralement pendant la phase d’atterrissage.
Pendant un atterrissage normal, le pilote communique avec la tour de contrôle, s’aligne sur la piste appropriée et tient au courant l’équipage. C’est similaire au décollage, sauf qu’on vole en direction du sol au lieu de s’en éloigner.
Parfois, l’atterrissage est normal, tout va bien et il se passe quelque chose à la dernière seconde, qui va conduire à un accident.
Une urgence à bord de l’avion
Dans d’autres situations, il y a déjà une urgence à bord de l’avion (une panne moteur, hydraulique ou électrique etc), ce qui complique déjà l’atterrissage et influe considérablement sur la distance de décélération de l’avion une fois sur la piste. Et puis ils atterrissent, et malheureusement quelque chose se passe mal.
Les statistiques peuvent être effrayantes, mais les chiffres montrent quand même que l’avion est le moyen de transport le plus sûr pour voyager. Et même si un accident se produisait sur votre prochain vol (à Dieu ne plaise), vous auriez 98,7% de chances d’y survivre. Bon vol !.
PS: Si vous avez des questions surtout n’hésitez pas et faites le moi savoir en commentaire. J’y répondrai aussitôt que le temps me le permet. Cdt. Habib Aboukhedoud, Pilote de ligne, formateur, je crois en une aviation africaine forte par les jeunes et pour les jeunes, alors démystifions l’aviation dans nos contrées et régions en partageant et en vulgarisant l’aéronautique.