« J’ai accouché à 50 ans », un chemin vers la maternité parsemé d’embûches pour Annabelle
A 41 ans, Annabelle rencontre le grand amour, avec qui elle décide de fonder une famille. Elle découvre alors que le chemin vers la maternité est semé d’embûches. Pendant 9 ans, douleurs et désillusions s’enchaînent. Jusqu’à ce 50e printemps, où ce bébé tant attendu arrive. Elle nous raconte.
Un désir d’enfant de toujours
J’ai toujours voulu être maman. Mais je ne me l’autorisais pas toute seule, aussi ai-je attendu de rencontrer « le bon ». Depuis toute jeune, je suis suivie pour une endométriose. A 30 ans, on découvre que j’ai un kyste sur l’ovaire droit, et l’on me conseille alors de ne pas tarder pour faire un bébé, si je le souhaite. J’en parle à mon conjoint d’alors.
Il n’est pas prêt et nous nous séparons. Les années passent. Je lis un article sur la congélation des ovocytes aux Etats-Unis et aborde le sujet avec ma gynécologue, qui me répond que c’est trop tard pour moi, vu mon âge. J’ai 35 ans. Sept ans plus tard, alors que je suis en couple, je lui expose notre souhait d’avoir un bébé. Elle me répond que je n’ai quasi aucune chance, de l’ordre de 5 %. Si j’avais su ! Je me serai affolée avant…
Un bébé en Espagne ?
La gynécologue me dit qu’il faut trouver une autre solution et, pour cela, il faut se rendre en Espagne. Mon conjoint est réticent. Notre âge l’inquiète, et il a surtout peur pour moi. De mon côté, ce n’est pas du tout mon cas. Ce bébé, je le veux ! Je lui dis « Tu veux un enfant ou pas ? ». Nous partons.
Les résultats des examens révèlent que lui aussi a un souci de fertilité. Nous faisons donc appel à un double don : d’ovocyte et de sperme. Deux embryons en résultent. On m’en transfère un, la grossesse s’arrête assez vite, il s’agit d’un oeuf clair. Un an plus tard, on m’implante le deuxième. Après deux mois et demi, je fais une fausse couche. C’est dur de s’en remettre, d’y croire à nouveau. Je passe par des phases up and down, d’une très grande hauteur et d’une incroyable profondeur. Une année passe et nous retournons en Espagne. De nouveau, il y a deux embryons. Aucun ne prend et une traversée du désert de plusieurs années commence alors. A l’époque, en Espagne, la limite d’âge pour ce protocole est fixée à 48 ans. Je me dis que c’est fini pour moi, et cherche d’autres solutions ailleurs.
Un jour, ma gynécologue de Paris me dit que l’âge limite a été décalé à 50 ans en Espagne, et précise que comme j’ai eu des fausses couches à répétition, j’ai le droit à des examens supplémentaires. Sur le moment, je me dis qu’il faut que je tourne la page et je ne réagis pas. Elle me fait tout de même une ordonnance. Six mois après, toujours dans l’optique de passer à autre chose, je vais faire l’examen. J’ai besoin de comprendre pourquoi ça ne fonctionne pas. Là, on découvre que j’ai une mutation génétique hétérozygote de la vitamine B9, qui empêche mon organisme d’assimiler l’acide folique. Cette découverte est une première avancée, mais cela n’explique pas tout. On continue les examens et, lors d’un rendez-vous, on me dirige vers un gynécologue particulier…
Une rencontre gynécologique décisive
Ce docteur, c’est un « vieux de la vieille », il doit frôler les 80 ans et pourtant, il est toujours en activité. Il prend à peine connaissance des résultats de mes précédents examens, me laisse peu parler et m’ausculte. Là, il me dit « on va pouvoir faire quelque chose » et me prescrit d’autres examens ainsi qu’une molécule particulière que mon corps pourra assimiler, contrairement à l’acide folique. Il me dit “Ça, je sais que ça fonctionne”. Cette phrase résonne comme un « go » pour moi.
On découvre alors qu’en plus de mon endométriose, j’ai de l’adénomyose. Une nouvelle qui soucie vraiment ce nouveau gynécologue. En prime, il m’annonce que je suis en pré-ménopause et qu’il faut agir vite. Il me prescrit alors une hormone particulière, visant à épaissir mon endomètre. Pendant six mois, on vérifie l’évolution via des échographies. Tantôt, l’endomètre n’est pas assez épais, tantôt, il l’est trop. Un jour, on découvre un kyste, heureusement mécanique. Il partira avec les règles, il faut donc attendre.
Enfin, on arrive enfin à la bonne épaisseur et on appelle la clinique espagnole. On nous répond qu’il y a un protocole à respecter, qu’on ne peut pas agir dans l’urgence. Je n’en peux plus, je hurle. Je n’en veux pas de ce protocole, s’il faut signer une décharge, je suis prête à le faire. Je leur donne le numéro de téléphone de mon gynécologue français.
Ils se penchent sur mon endomètre qui, à leurs yeux, est encore trop fin. Je reprends mon traitement jusqu’à leur feu vert. Une fois à la clinique, je ne suis pas leur préparation. Sur mon dossier, il y a écrit « hors protocole ». Je sens que les médecins espagnols sont intrigués par celui que mon gynécologue m’a fait suivre, et qu’ils « participent » en partie par curiosité.
Je suis à trois mois de mes 50 ans, je sais donc que c’est mon ultime tentative. Je suis sereine et je me dis que si ça ne fonctionne pas, je n’aurai pas de regret car j’aurai tout tenté, que j’accepterai. Et… ça marche ! Je suis de nouveau enceinte.
Maman a 50 ans
De retour en France, je suis stressée, j’ai peur de perdre mon bébé. Mon gynécologue me rassure et me dit : « grossesse tardive ne veut pas forcément dire grossesse à risque, tout va bien se passer ». Et effectivement, tout se déroule bien. Je n’ai aucune complication, j’adore être enceinte. Mis à part un petit diabète gestationnel et ma tension à surveiller, tout va bien. Je n’ai pas de suivi particulier.
Avec le futur papa, on attend 4 mois et demi de grossesse pour annoncer la bonne nouvelle, par prudence. Certaines personnes sont étonnées, d’autres ravies. Bien sûr, on me parle de mon âge avancé, de façon plus ou moins délicate d’ailleurs, même si cela se veut bienveillant. J’ai la chance de paraître plus jeune que mon âge, donc… On me félicite aussi pour mon courage, mon conjoint le premier.
Une césarienne est prévue 15 jours avant le terme, afin de ne prendre aucun risque. Notre petite Suzy naît en pleine santé. Avec son papa, nous rêvions d’une fille, nous sommes donc aux anges. C’est fou comme les galères traversées nous semblent loin.
Un double don passé sous silence
Nous tenons secret le double don, à l’exception d’une poignée de personnes. On s’évite ainsi les remarques qui pourraient nous mettre mal à l’aise. Mes parents ne le savent pas. Je sais que ma mère ne comprendrait pas. A mes yeux, la ressemblance, ça passe aussi par l’attitude, la façon de parler, la transmission des valeurs, l’éducation. Mais je sais que pour elle, le physique, ça compte. Je souris toujours quand elle me dit que ma petite Suzy ressemble à ma grand-mère, qu’elle a les mêmes yeux et les mêmes taches dans le cou.
Aujourd’hui, ma fille a sept mois. Elle est tellement mignonne, si souriante, expressive et éveillée. Même la nounou nous dit qu’elle n’a jamais vu ça ! C’est notre éclat de soleil.