Bénin – Projet de révision de la Constitution : Nourou-Dine Saka Saley brise le silence
Dans une Tribune récente, Nourou-Dine Saka Saley (NDSS) jeune juriste béninois et membre du parti Les Démocrates a réagi à la proposition de loi portant révision de la constitution en tenant compte du contexte politique.
Lintégralité de la Tribune
Gouvernez pour le futur et les autres, pas pour vous et vos intérêts.
À un moment de l’histoire, lorsqu’on a réalisé les exploits humains de se hisser à de nobles positions, et pour marquer notre passage dans l’histoire, il faut avoir le courage de se regarder dans un miroir pour corriger les erreurs que l’on sait nocives pour la grande masse… surtout lorsque les drames humains continuent de nous le prouver douloureusement.
De la même manière que l’on s’est regardés dans le miroir pour tailler les lois et pratiques à sa mesure, l’intelligence et l’humanité voudraient que lorsqu’on se rend compte que ces changements nous portent préjudice à nous-mêmes, que l’on ait l’humilité de les corriger, non pas pour soi mais pour le bien de la plus grande masse.
Je ne me lasse pas de dire qu’il n’y a eu aucune avancée qu’il faille préserver dans les réformes présentées comme telles.
Le code électoral présenté comme avancée ? Non, et archifaux, parce qu’à cause de la question de 10 % nos communes et parlement ont des dirigeants et des élus que les populations n’ont pas choisis. Ce n’est pas une avancée, mais un recul et une contestation du droit de vote des populations.
Avancée dans la charte des partis politiques qui oblige des personnes à être membre d’un parti politique et qui proscrit les alliances politiques ? Non ce n’est pas une avancée mais un diktat qui fragilise la libre association et adhésion à un groupement auquel on s’identifie… et les transhumances inter partis le prouvent honteusement.
On a vite trouvé le faux prétexte de la discipline de groupe pour camoufler ces insuffisances…oubliant que la discipline de groupe doit être le corollaire de la démocratie interne et de la transparence dans la prise de décisions dans un groupe…alors que nous assistons à des diktats individuels qui sont le contraire de la décision de groupe.
La loi sur le financement des partis politiques qui prive des partis régulièrement constitués, d’un accompagnement par l’argent public, n’est pas une avancée, mais une distribution discriminatoire de nos deniers et l’arrimage dépendant de nos formations politiques à l’argent public.
Aujourd’hui il existe un parti politique qui bénéficie de l’argent public…mais qui ne peut pas participer au débat politique sur la relecture du code électoral et la révision de la constitution en cours. Une inexplicable sottise.
Une constitution qui nous dote aujourd’hui d’un système de parrainage qui exclut par essence et qui permet à une petite poignée de personnes « mal élues des fois » parce que bénéficiant de la question des 10%, de choisir pour les autres, n’est pas une bonne constitution.
Une constitution qui dote l’Etat d’un poste de vice-président qui n’a pas l’équivalent du pouvoir d’un chef de service d’une commune et qui est à la limite un poste de décoration n’est pas une bonne constitution.
Donc ce sont des échecs sur toute la ligne….qui ont partitionné radicalement et en absolutistes les politiques et populations. Plus personne ne veut écouter l’autre parce que convaincus que c’est la survie matérielle et même humaine qui se joue à travers le pouvoir politique.
Une conjonction d’échecs institutionnels que je suis heureux 6 ans après, d’y avoir apporté critiques, alertes et propositions succinctes.
Il revient aujourd’hui aux acteurs de ce jeu politique que sont l’exécutif et les députés principalement, parce que seuls élus au suffrage universel direct et donnant naissance aux autres institutions, de nous permettre, nous citoyens, de retrouver un environnement socio politique et économique plus tolérant et vivable.
La constante est que l’opposition reste et demeure le métronome de cet exercice politique parce que sans l’opposition ce projet de révision constitutionnelle ne verra pas le jour.
Donc il est aujourd’hui de la responsabilité de l’opposition de soit dénaturer le projet de révision, de l’apprivoiser, mais tout au moins d’en donner l’orientation qu’elle veut.
L’opposition peut décider de complètement modifier le texte et de l’envoyer en référendum, de l’adopter en l’état dans la forme parlementaire, ou alors de le rejeter fermement avant même étude. Il n’y a aucune situation qu’elle ne puisse expliquer avec les bons mots à ses mandants.
L’opposition….dans la discipline idéologique…a toutes les cartes en main. À elle de savoir les tirer et les jouer….pour l’histoire.