Côte d’Ivoire : Tidjane Thiam élu président du principal parti d’opposition, PDCI
Le banquier franco-ivoirien a été élu, vendredi, président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire, ce qui lui permet d’envisager d’être candidat à la prochaine présidentielle en 2025.
Retour au pays réussi pour Tidjane Thiam. Le banquier franco-ivoirien a été élu, vendredi 22 décembre, président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), la principale formation d’opposition du pays.
M. Thiam a été élu très confortablement lors d’un congrès du parti à Yamoussoukro, avec 96,5 % des voix face au maire de la commune abidjanaise de Cocody, Jean-Marc Yacé, crédité de 3,2 % des voix selon les résultats proclamés tard en soirée. Plus de 6 000 congressistes étaient appelés à voter dans la capitale ivoirienne vendredi et ont pu accomplir leur devoir en fin de journée, sans incident majeur. La participation a atteint 64 %.
M. Thiam devient le troisième président élu de l’histoire du PDCI, fondé en 1946, après le père de la nation ivoirienne Félix Houphouët-Boigny et un autre ancien chef de l’Etat, Henri Konan Bédié. Sa victoire lui permet d’envisager d’être candidat à la prochaine présidentielle en 2025.
Après avoir rendu un « hommage appuyé à ses prédécesseurs », M. Thiam a estimé que « le déroulement et l’issue du congrès ont honoré » le parti. « C’est avec beaucoup d’humilité que j’accepte la responsabilité que vous avez décidé de me confier », a-t-il ajouté.
Rajeunir l’image du parti
Tidjane Thiam, ancien patron du Crédit Suisse de 2015 à 2020, faisait figure de favori, fort de sa notoriété internationale mais aussi du soutien d’une large majorité de députés du parti. Ovationné à son arrivée à Yamoussoukro, il a multiplié les selfies tout au long de la journée.
Avec l’élection de Tidjane Thiam, 61 ans, un âge considéré comme jeune pour exercer de hautes fonctions politiques en Côte d’Ivoire, le PDCI va rajeunir son image. « Notre nouveau président devra nous remettre en état de marche. Il devra donner plus de responsabilités aux jeunes du parti », avait déclaré le président par intérim du parti, Philippe Cowppli-Bony, âgé de 91 ans.
L’ancien dirigeant du PDCI, Henri Konan Bédié, président de la Côte d’Ivoire de 1993 à 1999, est mort en août à 89 ans et n’excluait pas de se présenter à la présidentielle de 2025. « On nous a trop traités de parti de vieux. C’est positif de voir deux candidats jeunes, ça fait plaisir », s’est de son côté réjoui Ohoueu Assi, un congressiste venu de Guiglo dans l’Ouest.
Le parti qui vise le retour au pouvoir dans deux ans, a également proposé vendredi soir de soutenir M. Thiam en vue d’une investiture pour 2025. « 2025 sera une année électorale cruciale pour notre parti nous nous devons d’être prêts. Nous devons préparer cette échéance dès demain matin », a lancé vendredi soir, M. Thiam sous les acclamations de l’audience.
A la tête de la Côte d’Ivoire sans discontinuer de 1960 à 1999, l’ancien parti unique n’a plus accédé à la magistrature suprême depuis 24 ans lorsqu’un coup d’Etat avait chassé Henri Konan Bédié du pouvoir, un soir de Noël 1999. Un temps allié d’Alassane Ouattara, au pouvoir depuis 2011, le PDCI a repris sa place dans l’opposition en 2018 et a boycotté la dernière présidentielle.
Plus de deux décennies hors du pays
La tenue du congrès du PDCI, vendredi, a été incertaine tout au long de la semaine, après un report samedi dernier par la justice ivoirienne, saisie par deux militants qui dénonçaient des irrégularités dans la liste des congressistes. La décision pointait notamment des risques de « troubles à l’ordre public » pour justifier ce report et la police s’était déployée samedi matin pour empêcher d’accéder au lieu du congrès. Alors que le PDCI avait reprogrammé le congrès à vendredi à Yamoussoukro, les deux mêmes militants avaient à nouveau saisi la justice, avant de finalement retirer leur plainte, jeudi soir.
M. Thiam avait quitté Abidjan après le coup d’Etat de 1999 alors qu’il occupait un poste ministériel. Peut-il, après plus de deux décennies hors de la Côte d’Ivoire, incarner un présidentiable crédible quand ses détracteurs l’estiment coupé des réalités du pays ?
« Il a un avantage : il n’est mêlé à aucune affaire de gestion du parti, il a un rayonnement international, c’est quelqu’un de son temps et dans son temps », glisse un cadre du PDCI.
Signe que son retour ne passe pas inaperçu, des cadres du RHDP, le parti au pouvoir en Côte d’Ivoire, ont lâché leurs coups au lendemain de son premier meeting à Yamoussoukro, début décembre, l’invitant notamment à être « humble et un peu moins prétentieux ».
Petit-neveu de Félix Houphouët-Boigny (1905-1993), Tidjane Thiam a mis cet atout en avant lors de son retour en politique ces dernières semaines, en évoquant « avec une grande émotion » la « terre de [ses] ancêtres ».